MOLCER 1, Vadim Rogovine

Vadim Zakharovittch Rogovine nait le 10 mai 1937 à Moscou, dans une famille de chimistes. Diplômé de la faculté de philologie de l’Université d’Etat Lomonossov, il travailla de 1977 jusqu’à sa mort comme collaborateur de l’Institut de sociologie de l’Académie des sciences de Russie. Auteur de très nombreux ouvrages de sociologie et d’histoire, il publie en particulier à Moscou, au lendemain de la chute de l’Union soviétique, une série en sept tomes, consacrée à la lutte interne de l’Opposition de gauche dans le parti bolchevique dans les années 1920, sous le titre « Y avait-il une alternative ? » Ces ouvrages, s’appuyant sur les documents des archives qui venaient d’ouvrir, n’ont hélas jamais été traduits en français. A l’occasion du 80e anniversaire de l’assassinat de Léon Trotsky, le 20 août 1940 à Mexico, nous publions pour nos lecteurs, et pour la première fois en français, des extraits des tous derniers chapitres du dernier ouvrage de la série : La fin signifie le début. Vadim Rogovine, cofondateur, avec Jean-Jacques Marie des Cahiers du mouvement ouvrier en 1998, disparut le 25 septembre 1998 à Moscou. 

Le dernier jour

Le 20 août, Trotsky se leva à 7 heures du matin et dit à sa femme : « Tu sais, depuis ce matin, je ne me suis jamais senti aussi bien depuis longtemps. » Sa bonne condition physique lui donnait l’espoir de pouvoir travailler « au mieux » ce jour-là. « Ces derniers temps, se souvint Natalia Sedova , Léon Davidovitch se plaignait de ne pas se sentir bien, ce qui lui arrivait de temps à autre… Mais ce jour là semblait être le début d’une amélioration de son état physique. Et il avait l’air tout à fait en forme. »
Après son petit-déjeuner, Trotsky répéta qu’il se sentait en pleine forme et qu’il voulait dicter un article sur la mobilisation générale aux Etats-Unis. A une heure de l’après-midi, il a été arraché à ce travail par l’arrivée de son avocat, Rigalgo. Après sa visite, Trotsky vint dire à sa femme qu’il était contraint, non sans regret, de reporter l’article qu’il avait commencé et de se remettre au travail qu’il avait entrepris précédemment, pour préparer son procès en diffamation. 
Jusqu’à cinq heures de l’après-midi, Trotsky dicta sur son dictaphone quelques morceaux de son article sur la mobilisation générale aux Etats-Unis, ainsi que près de 50 feuillets dévoilant les insinuations du journal El Popular  . 
A dix-sept heures trente arrive « Jacson », que personne n’attendait, habillé exactement comme le 17 août : coiffé d’un chapeau et portant un imperméable sur le bras gauche, serré contre le corps. Ceci bien qu’il se soit toujours vanté de ne porter ni chapeau ni manteau quel que soit le temps qu’il faisait, or il faisait précisément beau temps ce jour-là.
Jackson avait l'air très nerveux, il avait le teint grisâtre. L’accueillant, Natalia Ivanovna se dit intérieurement : « Pourquoi se met-il à venir si souvent ? » « Pourquoi avoir mis un manteau et un chapeau ? », lui demanda-t-elle, « il fait si beau aujourd’hui. » « Oui, mais vous savez, cela ne durera pas, il pourrait pleuvoir », répondit Jackson. Puis il s’est dirigé vers Trotsky, qui s’occupait de ses clapiers à lapins. Sedova, l'accompagnant, lui demanda : « Votre article est-il prêt ? » « Il est prêt. » « Il le sortit d'un mouvement contraint du bras, qu’il gardait rivé à son corps, pressant son manteau, dans lequel, comme on l'a appris plus tard, un piolet et un poignard avaient été dissimulés, et m'a montré plusieurs feuilles de papier tapées à la machine. »
Comme deux jours auparavant, Trotsky, après avoir échangé quelques mots avec « Jackson », l'invita à rejoindre son bureau. Quelques minutes plus tard, Mercader le frappait d’un coup terrible à la tête avec un piolet, croyant qu’il tuerait Trotsky sur le coup. Mais Trotsky poussant un cri perçant, s'est retourné, se jetant sur son tueur, réussissant à se saisir du piolet.
En 1969, lorsque Soudoplatov  a rencontré Mercader pour la première fois depuis 30 ans, ce dernier lui déclara que cette réaction de Trotsky l’avait déstabilisé, l’empêchant de le poignarder alors qu'il avait un couteau sur lui. « Rendez-vous compte, dit Mercader, pendant la guerre civile espagnole, j’ai poignardé une sentinelle sur un pont avec un couteau, mais cette fois, le cri de Trotsky m'a littéralement paralysé ».
Se remémorant ces instants, Sédova raconta : « J'ai entendu un cri terrible et strident. Ne comprenant pas qui avait poussé ce cri, je me précipitais vers sa provenance. Entre le salon et le balcon, sur le seuil, appuyé au montant de la porte... Lev Davidovich était debout ... le visage ensanglanté et ses yeux bleus brillants sans ses lunettes, les bras ballants... Je l'ai serré dans mes bras... Nous avons fait quelques pas pour nous éloigner et L.D., avec mon aide, s'est allongé sur le sol, dans le passage.
-    Natacha, je t’aime… - a-t-il dit de façon si inattendue, si profonde, presque sévère à tel que point que privée de mes forces par un frisson intérieur, je me suis penchée vers lui…
-    Tu sais, là-bas, - il me montrait du regard la porte de son bureau, je l’ai senti… j’ai compris, ce qu’il voulait faire… il voulait me… encore une fois… mais je ne l’ai pas laissé, dit-il calmement, tranquillement, d’une voix cassée. 
Pendant ce temps, les gardes sont entrés en trombe dans le bureau et ont commencé à passer à tabac "Jackson". À ce moment-là, l’assaillant – pour la première et la dernière fois – a perdu le contrôle de lui-même, n’oubliant pas cependant qu'il ne devait pas parler espagnol. Il cria, en français : « Ils m'ont obligé à faire ça... Ils retiennent ma mère en prison. Ils vont la tuer... S'il vous plaît, tuez-moi ! Je veux mourir ! »
En entendant les cris de « Jackson », Sédova a demandé à Trotsky : « Que faire avec lui ? Ils vont le tuer. » « Non... ne le tuez pas, il faut le faire parler », me répondit L.D., en articulant toujours avec difficulté.
Entendant ces paroles, les gardes ont commencé à chercher à faire avouer au tueur qu'il avait agi sur les ordres du Guépéou. Ne s’étant pas encore remis des coups, mais récitant fidèlement sa légende, « Jackson » répondit que ce n’était pas le Guépéou qui l’envoyait, mais une personne qu'il ne connaissait pas, mais qui lui avait ordonné de le faire.
Bientôt un médecin arriva qui, après avoir examiné la plaie, dit à Trotsky qu’elle n’était « pas dangereuse ». « L. D. a écouté cela calmement, presque avec indifférence, comme si on ne pouvait pas s'attendre à une autre réponse d’un médecin dans une telle situation, - se souvint Sédova, - Mais, se tournant vers Joe [Hansen] et désignant son cœur, il dit en anglais :" Ici, je le sens... c'est la fin, cette fois ils ont réussi "... Il voulait m'épargner. »
Ensuite, la police est arrivée, envoyant la victime et l'auteur de l'acte terroriste à l'hôpital sous haute surveillance. C’est là-bas que Trotsky a appelé Hansen et lui a dicté : « S’il vous plait, dites à mes amis que je suis confiant dans la victoire de la Quatrième Internationale... En avant ! »
Trotsky sombra très vite dans l’inconscience, dont ne le fit pas sortir l’opération urgente. « Sans le quitter les yeux, je me suis assise à ses côtés toute la nuit, attendant son "réveil"  », déclara Sédova. « Ses yeux étaient fermés, mais sa respiration, parfois lourde, parfois même calme, me donnait espoir. La journée passa ainsi. En milieu de journée, il y eut une amélioration, selon les médecins. Mais en fin de journée, il y eut une modification brutale de la respiration du patient : elle devint rapide, rapide et mortellement alarmante… On le souleva. Sa tête tombait sur son épaule. Ses bras étaient ballants, comme après la crucifixion dans la « Descente de croix » du Titien. La couronne d'épines du mourant était ici remplacée par un bandage. Les traits de son visage avaient conservé toute leur pureté et leur fierté. Il semblait qu'il allait se redresser et s’en débarrasserait de lui-même. Mais la profondeur de la blessure au cerveau était trop grande. Le réveil, tant attendu, n'a pas eu lieu ». 
A 19 heures 25, le 21 août 1940, Trotsky s’éteint.

La lettre de l’assassin

Décrivant les principales tâches de l'opération « Outka » (« le canard », nom de code de l’assassinat de Trotsky – NDT), Soudoplatov notait : « Il était également d’une grande importance de donner une explication motivée au meurtre dans le but de compromettre Trotsky et ainsi de discréditer son mouvement. Le meurtre était censé ressembler à un acte de vengeance personnelle contre Trotsky, parce qu’il aurait découragé Sylvia Ageloff  d'épouser Mercader. Si Mercader était capturé, il devait déclarer (...) que Trotsky tentait de le convaincre de rejoindre une organisation terroriste internationale, ayant pour objectif d’assassiner Staline et d'autres dirigeants soviétiques. »
Dans ce but fut fabriquée une lettre de Mercader rédigée en français, que Mercader blessé s'empressa de remettre à l'ambulancier qui le conduisait à l'hôpital, et dont le contenu fut rapidement rendu public.
Dans la lettre, l'auteur, se présentant comme un citoyen belge du nom de Jacques Mornard, écrivait qu'il voulait « expliquer aux gens ses motivations qui l'avaient poussé à commettre cet acte de représailles ». Il y « exposait des informations sur ses parents belges, sur ses études en Belgique et en France, sur son intérêt pour les activités politiques des trotskystes, sur sa connaissance de certains représentants de ce mouvement ». Il y affirmait qu'un certain « membre dirigeant de la Quatrième Internationale » (dont le nom n’était pas donné) l'avait invité à se rendre au Mexique pour entrer directement en contact avec Trotsky. Il prétendait avoir reçu de cet homme un passeport canadien au nom de Frank Jackson et de l'argent pour le voyage.
Plus loin, l'auteur de la lettre y détaillait les motifs du meurtre : à la suite de relations personnelles et de « discussions fréquentes » avec Trotsky, il aurait progressivement commencé à se désillusionner sur la théorie et la pratique du mouvement trotskyste. Il affirmait avoir découvert que Trotsky « était dévoré par la haine et la soif de vengeance » et qu’il s'était engagé dans une conspiration avec « certains des dirigeants de pays capitalistes ». Puis, après que Trotsky ait commencé à le convaincre de se rendre en Union soviétique pour commettre « une série (!) d’attentats » contre diverses personnalités, et en particulier contre Staline, il (NDT) avait pris la décision d'éliminer ce malfaisant. En cela, il était censé être aidé par le « comité parlementaire d'une grande puissance étrangère » (mais nulle précision dans la lettre quant à ce comité et à cette grande puissance – Vadim Rogovine).
« Mornard » évoquait enfin un motif supplémentaire à son meurtre : Trotsky lui avait intimé l’ordre de « quitter sa femme », celle-ci ayant rejoint le groupe de Shachtman  .
En outre, la lettre affirmait que les sympathies de Trotsky allaient à Almazan  et que, de toute évidence, Trotsky appartenait à un groupe de conspirateurs ayant l'intention d'assassiner Lombardo Toledano  et du candidat à l’élection présidentielle mexicaine Avilo Camacho . Cette partie de la lettre avait pour but de dresser l'opinion publique mexicaine contre Trotsky.
Enfin, Mornard affirmait que le parti de Trotsky était très désargenté (contredisant par là les « aveux » des condamnés des procès de Moscou, selon lesquels Trotsky et les trotskystes étaient financés par toutes les grandes puissances capitalistes), et que seul « le consul d'une grande puissance étrangère », qui rendait souvent visite à Trotsky, pouvait répondre à la question de l’origine des fonds dépensés pour protéger sa maison.
Les derniers mots de la lettre étaient, pour ainsi dire, recopiés des discours de Vychinsky  lors des fameux procès : « L'histoire m’approuvera d'avoir éliminé le pire ennemi de la classe ouvrière ».
Salazar  a facilement démontré que la lettre avait été tapée sur une machine à écrire plusieurs jours avant que la signature « Jacques » et la date « 20/08/1940 » y soient inscrites au crayon.
James Cannon  a qualifié la lettre de Mornard de « stupide tentative de l'esprit policier de produire des faux discrédités aux yeux du monde entier ». (…)

Deux jours après la mort de Trotsky, une brève note est parue dans la Pravda : « La radio londonienne a rapporté aujourd'hui : « Trotsky est mort dans un hôpital au Mexique d'une fracture du crâne, reçue lors d'un attentat contre lui commis par l'un de ses plus proches associés ». À côté de cette note était publié un article titré « Mort d'un espion international », et qui commençait ainsi : « Selon la presse américaine, un attentat a eu lieu contre Trotsky, qui vivait au Mexique ces dernières années. L’assaillant – Jacques Mornard Vandendriessche – est l’un des plus proches de ses disciples. » Puis, l'article décrit brièvement – dans l'esprit des Cours abrégé sur l'histoire du VKP(b)    - une biographie de Trotsky, se terminant ainsi : « Trotsky s'est empêtré dans ses propres réseaux, atteignant la limite de la déchéance humaine. Il a été tué par ses propres partisans (...) Trotsky (...) est devenu victime de ses propres intrigues, de ses trahisons, de ses atrocités. »
Volkogonov , qui a pris connaissance de la censure stalinienne lors de la relecture de l'article, a écrit que Staline n'avait fait au projet d’article qu'un certain nombre d'ajouts concernant Trotsky: « organisateur des assassins », « il a appris à tuer par derrière », « Trotsky a organisé les meurtres crapuleux de Kirov, Kouïbychev, Gorki » , « il portait au front le sceau d'un espion international et d'un assassin », etc.
Certaines publications de partis communistes étrangers sont allées encore plus loin. Ainsi, le journal américain Daily Worker  s'est empressé d'annoncer le 22 août que « Jackson était le secrétaire particulier de Trotsky depuis de nombreuses années ».
La presse stalinienne mexicaine a contribué activement à la diffusion de cette version stalinienne des motivations du meurtre de Trotsky. Certes, immédiatement après le meurtre, le Parti communiste et Toledano ont condamné l’attentat, accusant des provocateurs visant à ternir la réputation du Mexique. Mais quelques jours plus tard, les journaux communistes et lombardistes  ont commencé sur tous les tons à exposer le contenu de la lettre écrite attribuée au meurtrier pour se couvrir et dépeindre Mercader comme un trotskyste invétéré, désabusé par son chef. (…)

L’activité du NKVD  dans la lutte contre les « trotskystes » après la mort de Trotsky

Selon les informations livrées par Volkogonov dans son livre, peu de temps après avoir reçu la nouvelle de l'assassinat de Trotsky, Beria, suivant les instructions de Staline, ordonna la « liquidation des trotskystes actifs dans les camps ». A la veille de la guerre, une nouvelle vague de moindre envergure que les précédentes, balaya les camps, liquidant les derniers condamnés, caractérisés comme « trotskystes actifs ». (Mais la lutte à l'intérieur même de l’Union soviétique, contre le « trotskysme », ne s'est pas non plus arrêtée là. Après la guerre, en 1947, Staline ordonnait « la création de prisons et de camps au régime le plus strict pour les criminels d'État particulièrement dangereux, et en premier lieu pour les "trotskystes" ». Et bien que Volkogonov fasse référence à une telle mesure avec ironie, repoussant l’idée qu’il pouvait encore exister des trotskystes – selon lui, même au milieu des années 1930, ceux-ci ne comptaient pas plus de 300 à 400 individus – ce fait témoigne de l’existence réelle de leur résistance jusqu'à la mort même de Staline. Cette thèse est confirmée par la divulgation, en 1951, de l’existence de deux organisations de jeunesse trotskystes à Moscou et à Leningrad, dont les dirigeants furent fusillés. Comme le rappelle M. Oulanovskaïa, membre de l'organisation moscovite appelée Union de la lutte pour la cause de la révolution, ce groupe, qui se considérait comme trotskyste, ne se fixait pas seulement comme but de lutter contre le régime existant, mais avait y compris discuté de la question de l'élimination physique de Staline.
La mort de Trotsky n’a pas mis un terme à l’infiltration d'agents du NKVD dans les organisations trotskystes à l’échelle internationale, en particulier dans le Socialist Workers Party (SWP) des Etats-Unis. Soudoplatov a indiqué que ces activités étaient « l’une des priorités importantes du travail du renseignement soviétique dans les années 1930-1940 », parce que Staline voulait savoir ce qui se passerait dans les cercles trotskystes après l'assassinat de Trotsky : « Les trotskystes maintiendront-ils leur force et constitueront-ils une menace pour l'URSS sans leur chef ? » Ainsi Staline continuait-il régulièrement à lire les rapports provenant de l’agent qu’il avait réussi à infiltrer dans la rédaction du journal trotskyste publié à New York. « C’est de lui, se rappelait Soudoplatov, que nous recevions des informations sur les plans et les objectifs de leur mouvement, et établi en conséquence notre dispositif pour combattre le trotskysme. Il ne fut pas rare que Staline ait eu la possibilité de lire des articles et des documents trotskystes avant même leur publication en Occident. » (…)

Réponses à l’assassinat de Trotsky

Pendant cinq jours, le corps de Trotsky, entouré de ses amis, fut exposé dans le bâtiment de la mairie de Mexico. Au moins cent mille personnes défilèrent devant lui dans un silence respectueux. Les obsèques furent marquées par une procession funéraire de milliers de personnes à Mexico, qui se transforma en une grandiose manifestation antistalinienne. Le gouvernement mexicain prit en charge la responsabilité et le financement des funérailles.
Si pour des raisons politiques, le président Cardenas ne participa pas à la cérémonie funéraire, il nota néanmoins dans son journal (publié pour la première fois en 1972), le jour de la mort de Trotsky, ces lignes : « Les actes et les idées des peuples ne disparaissent pas avec la mort de leurs dirigeants, bien au contraire, ils sont encore plus fortement confirmés par le sang du sacrifice pour une sainte cause. Le sang de Trotsky deviendra un engrais dans le cœur de ses compatriotes. »
Des télégrammes exprimant sympathie et condoléances furent envoyés tant par des particuliers que par les sections de la IVe Internationale, ainsi que par le POUM espagnol, l’Independent Labour Party de Grande-Bretagne, le RSAP de Hollande, le Parti socialiste indépendant d'Italie et d'autres organisations de gauche. La notice nécrologique du Parti trotskyste de Ceylan était intitulée « L'assassinat de Trotsky : œuvre des mains malfaisantes de Staline ».
La déclaration du Comité central du Socialist Workers Party des États-Unis, intitulée « Nous accusons Staline ! », affirmait : « L'avant-garde de l'humanité progressiste est à jamais privée de l’œuvre infatigable de Trotsky, de son dévouement incorruptible. Elle a perdu ses sages conseils, l'inspiration de son courage inflexible. Mais les fruits de ses quarante ans de travail et de lutte intrépide resteront éternels... Il n'existe aucune force au monde capable de détruire l'héritage foisonnant qu'il nous a laissé, le don de son génie inégalé à la cause de l'humanité... Nous n'oublierons pas le dernier appel du camarade Trotsky : "Dites à nos amis : je suis certain de la victoire de la Quatrième Internationale. En avant !"  »
Le discours passionné et sincère de James P. Cannon, « À la mémoire du Vieux », prononcé le 28 août lors d'un meeting d’hommage de masse à New York, fut imprégné de pensées profondes. Cannon a souligné que « Trotsky considérait les idées comme la plus puissante force au monde. Leurs auteurs peuvent être tués, mais les idées elles-mêmes, une fois mises en circulation, vivent leur propre vie. C'était le concept central de la philosophie du camarade Trotsky. Il nous l’a enseigné plus d'une fois. Il avait écrit un jour : "Ce n'est pas le parti qui crée le programme (l'idée), mais le programme qui crée le parti". Dans une lettre personnelle qu'il m'a adressée, il a écrit : "Nos idées sont les plus correctes et les plus puissantes, mais nous travaillons avec d’infimes forces et ressources matérielles. Mais en définitive, les idées justes finissent toujours par l’emporter, trouvant les forces et les moyens matériels nécessaires dans lesquelles elles s’incarnent". » (…)
Cannon considérait qu’avec l’assassinat de Trotsky, le coup le plus dur qui était porté l’était contre le peuple russe : « Le simple fait que la camarilla stalinienne a dû tuer Trotsky onze ans après qu’elle l’a chassé de Moscou, qu’elle ait dû déployer des trésors d’énergie pour détruire la vie de Trotsky, est le témoignage majeur de ce que Trotsky vit toujours dans le cœur du peuple russe. » (…)
Au meeting d’hommage après l’assassinat de Trotsky, J. Cannon raconta que quelques jours avant cet évènement tragique, la rédaction du Bulletin de l’opposition avait reçu de Riga une lettre, dont ses auteurs racontaient que « nous avons appris par cœur, mot par mot, la Lettre ouverte aux travailleurs de l’URSS, et nous la diffuserons par le bouche à oreille ». « Et en effet, nous sommes convaincus, dit Cannon en commentant ce message, que les paroles de Trotsky vivront plus longtemps en Union soviétique que le sanguinaire régime de Staline. »


Présentation, traduction, choix des extraits : Dominique Ferré


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