MOLCER n°2, François de Massot
Si l’on jette un coup d’œil sur l’une des chronologies « en ligne » des événements saillants de l’année 1942, on y trouvera, à juste titre, annoncés début de la bataille de Stalingrad, à l’été 1942, ce tournant de la Seconde Guerre mondiale, en novembre, le débarquement anglo-américain en Afrique du Nord et, pour ce qui est de l’Asie, la bataille navale de Midway, conclue par la défaite – dont elle ne se relèvera pas – de la flotte japonaise. Mais souvent, ce qui s’est passé en Inde en Août 1942 est ignoré pour n’être traité sommairement que dans une rubrique particulièrement consacrée au continent asiatique.
Pourtant, le mouvement d’août 1942 en Inde est un moment important de la Seconde Guerre mondiale, annonçant les bouleversements révolutionnaires qui vont marquer sa conclusion. Il constitue l’une des premières manifestations, à ce niveau, de l’immense révolte des peuples placés sous le joug colonial, mouvement qui disloquera d’abord en Asie tous les vieux empires coloniaux (britannique, français, hollandais) pour s’étendre à l’échelle mondiale comme composante de la vague révolutionnaire qui déferle alors sur tous les continents.
In Inde même, le soulèvement révolutionnaire de 1942 constituera un test pour tous les courants politiques qui se réclament de la classe ouvrière. Ils devront prendre leurs responsabilités dans la lutte contre la domination impérialiste, répondre aux questions spécifiques posées par les caractéristiques particulières du conflit mondial en cours, définir leur position face au mouvement national et à sa direction qui se trouve entre les mains de la bourgeoisie indienne.
Rappelons brièvement ce qu’est alors ce qu’on appelle « l’Empire des Indes ». Léon Trotsky note à ce sujet (1) que « L’Inde est le pays colonial classique comme la Grande Bretagne est la métropole classique », caractérisation qu’à sa manière Winston Churchill reprenait en assurant qu’il ne prendrait jamais la responsabilité de séparer l’Inde de la Grande Bretagne (2). « L’Empire des Indes » avait les dimensions d’un continent englobant les Etats aujourd’hui existants de l’Inde, du Pakistan et du Bangladesh, un ensemble qui regroupait plus de 320 millions d’habitants agrégeant des régions historiquement distinctes et disposant de leurs langues, leurs cultures, leurs religions. L’ensemble était gouverné par un vice-roi, détenant tous les pouvoirs exécutifs, nommé par Londres. Environ 60% de ces territoires étaient directement contrôlés par le gouvernement central du vice-roi, 40% étaient nominalement entre les mains de princes indiens conservant leurs richesses et leurs privilèges mais étroitement soumis aux autorités britanniques. Ce n’est pas que dans ce domaine que le colonisateur maintenait en les pétrifiant, toutes les survivances précapitalistes, notamment dans le domaine agraire, ce qui explique la persistance du système des castes. Contradictoirement, les besoins mêmes de l’exploitation coloniale conduiront à de profonds bouleversements (3). En relation avec une industrialisation, limitée...
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