MOLCER n°2, Gilles Candar
Les reconstructeurs sont un peu le courant oublié de l’histoire du mouvement ouvrier. Cela se conçoit : d’un côté, si « la nuit finit à Tours », seront exaltés les militants du Comité de la iiie Internationale, éventuellement les ralliés comme Cachin qui restent ensuite au PCF. De l’autre, on honorera la volonté de « garder la vieille maison » émise par Blum au nom de la résistance socialiste. Mais les « centristes », les hésitants, qui font des choix parfois provisoires, peuvent-ils mobiliser les enthousiasmes ? Et pourtant, ils ont existé, avant, pendant et encore après Tours.
Une nouvelle direction (1918)
Rappelons d’abord que fin 1920 ces reconstructeurs sont en place depuis un peu plus de deux ans. Le changement de majorité se produit lors du congrès réuni du 6 au 9 octobre 1918. Alliés au petit courant « centriste » apparu à la fin de l’année précédente, les anciens « minoritaires » accèdent à la direction. Auparavant, ils ont critiqué l’orientation de l’ancienne direction, celle des « majoritaires », mais pas nécessairement de la manière tranchée parfois imaginée ou reconstruite après coup. Pendant la guerre, le principe de la défense nationale est largement admis. Celui de la participation aux gouvernements de guerre est plus controversé, sans pour autant se confondre tout à fait avec le clivage majoritaires/minoritaires. Les critiques les plus nettes portent sur l’expression publique, à la fois sur la forme du discours politique, qui doit selon les « minoritaires » maintenir les principes socialistes et internationalistes, et sur le fond, celui des buts de guerre et de la recherche d’une paix possible. Quelques-uns vont plus loin, participant à des conférences avec des socialistes de pays ennemis (Zimmerwald et Kienthal) ou refusant le vote des crédits de guerre (les trois députés Brizon, Blanc et Raffin-Dugens). Mais cette aile plus avancée fait souvent bloc avec la minorité officielle afin de renverser la majorité. L’opposition « minoritaire » s’appuie sur la fédération de la Haute-Vienne, de tradition guesdiste, forte de ses quatre députés socialistes. Depuis mai 1916, elle dispose d’un journal hebdomadaire, Le Populaire, devenu en avril 1918 quotidien parisien du soir.
Fin 1918 fut donc désignée une nouvelle équipe. Au secrétariat, l’instituteur Louis-Oscar Frossard donne une autorité inédite à cette fonction naguère secondaire. Pour diriger...
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