François-Vincent Raspail : candidat révolutionnaire à la première élection présidentielle en décembre 1848

MOLCER 8- Roger Revuz- De nos jours, peu de personnes savent qui était Raspail bien que nombre de rues et d’avenues, une station de métro à Paris, portent son nom. Pourtant Raspail fut au XIXè siècle une figure importante et populaire du mouvement ouvrier. Il participa activement à la Révolution de Février 1848, révolution elle aussi bien oubliée.  Il fut le premier candidat socialiste révolutionnaire à se présenter à la première élection présidentielle en décembre 1848…. pour protester contre le principe même d’élire un président. Car disait-il à quoi bon avoir supprimé la monarchie si c’était pour élire un monarque républicain. 

François-Vincent Raspail est né en janvier 1794 à Carpentras, sous le gouvernement révolutionnaire, dans une famille de la petite bourgeoisie, son père était restaurateur.
Il entre au séminaire, destiné par sa mère au sacerdoce. Il est alors un ardent partisan de Napoléon.  A la chute de celui-ci il doit fuir Carpentras pour Paris pour échapper à la Terreur blanche que déclenchent les partisans de la restauration monarchique. A Paris il rompt définitivement avec l’Eglise tout en restant croyant et adhère à franc-maçonnerie. Républicain anticlérical, il devient membre de la Charbonnerie, société secrète fondée à Paris en 1821 qui demandait à ses adhérents de posséder un fusil et 25 cartouches ! 
Tout en militant politiquement il poursuit des études de chimie et de médecine.  Dans la notice biographique de son Dictionnaire, l’historien Jean Maitron écrit :« Il [développa] ses idées sur la cellule vivante, sur les maladies et la contagion. Il fut l’initiateur des travaux sur la cellule, le précurseur de Pasteur, le fondateur de la microchimie. Pour enrayer la contagion, il utilisa le camphre, base de sa médecine, que les familles républicaines considèreront comme une panacée jusqu’à nos jours, à son exemple ». Non reconnu par la faculté, il pratique illégalement la médecine. « Mettant gratuitement ses connaissances médicales au service des pauvres, s’efforçant de propager parmi eux les idées d’hygiène, le ″Père Raspail″ acquit vite, grâce à sa charité et à ses rapports avec les ouvriers, une grande popularité » .

Raspail et la révolution de 1830
Raspail participe activement au renversement de Charles X lors des «Trois  glorieuses », les 27, 28 et 29 juillet 1830. Il se bat sur les barricades et est blessé lors de l’assaut d’une caserne. Alors qu’il a accueilli le nouveau régime de la Monarchie de Juillet avec un certain enthousiasme, il déchante vite et adhère à la Société des Amis du peuple, organisation républicaine, dont il devient  rapidement le président. Cette organisation est presque aussitôt en butte à la répression. La société est dissoute et ses dirigeants accusés d’atteinte à la sureté de l’Etat. En janvier 1832 s’ouvre le procès de quinze dirigeants de la Société des Amis du Peuple dont Raspail et Blanqui. Blanqui, plus jeune que Raspail, considérait celui-ci comme son plus vieux compagnon de lutte. Il avait été le témoin de Raspail à son mariage.  Raspail est condamné à quinze mois de prison, Blanqui à un an.  Sa plaidoirie lors du procès est diffusée dans le pays par les républicains et fait de lui un héros,  contribuant à sa popularité.

 Février 1848 : Raspail proclame la République
De 1840 à 1848, Raspail doit faire face aux autorités qui lui cherchent des ennuis pour exercice illégal de la médecine. Pendant cette période son rôle politique est plutôt effacé. Pour l’historien Jean Maitron « il vieillissait aussi dans une sorte de légende qui le représentait le fusil à la main pour recevoir les policiers et le camphre de l’autre pour guérir le reste de l’Humanité ».
 C’est la Révolution de Février qui pousse Raspail à intervenir à nouveau dans la vie politique. En effet, dans les premières heures de la révolution, le scénario de 1830, c’est-à-dire la substitution d’un monarque par un autre, a failli se reproduire.  Le Gouvernement provisoire qui se constitue le 24 février tarde à proclamer la république. Ce gouvernement provisoire est un compromis entre les différentes classes qui avaient renversé la monarchie de Juillet. La majorité de ses membres représentent la bourgeoisie ou comme Ledru-Rollin la petite -bourgeoisie démocratique ; Louis Blanc, théoricien socialiste et Albert, ouvrier mécanicien, leader de société secrète  représentent la classe ouvrière. Très vite des rumeurs courent sur la possibilité d’une régence. La duchesse d’Orléans, la veuve du fils ainé du roi Louis-Phillipe, demandait la proclamation de son fils âgé de neuf ans et l’attribution de la régence à son beau-frère, le duc de Nemours.  A la demande d’ouvriers charpentiers, Raspail accepte de se rendre à l’Hôtel de ville où siège le Gouvernement provisoire avec mission de proclamer la république....

Pour lire la suite, achetez le numéro et abonnez-vous....