MOLCER 8- Catherine Collomp- Comme son nom l’indique, le Jewish Labor Committee (JLC), appartient à la fois à l’histoire du monde ouvrier et à celle du monde juif américain. Cette double identification au croisement de deux grands ensembles de représentation sociale et de domaines de recherche historiographique a rendu difficile de garder le souvenir de son existence et de son accomplissement. Les cécités de chaque côté de cette identité, Labor and Jewish, continuent de masquer la réalité de ses engagements.  Parce qu’il n’existe plus de monde ouvrier juif aux Etats-Unis, voire même presque plus de monde ouvrier au sens où on l’entendait dans les années 1930, cette identité multiple est difficile à percevoir même historiquement. D’autant plus que le JLC est atypique dans ces deux cercles d’affiliation. Les sauvetages qu’il a réalisés pour secourir des victimes du nazisme et du fascisme, le soutien politique et humanitaire qu’il a fait parvenir en Pologne pendant la Seconde guerre mondiale, comme les liens qu’il a établis avec des réseaux de Résistance sont pourtant à mettre à l’honneur de l’histoire ouvrière comme de l’histoire juive-américaine. 


Origine et fondation du Jewish Labor Committee

Fondé à New York en 1934 dans le milieu des travailleurs de la confection, qu’on appelait informellement the Jewish labor movement, le JLC fut la première organisation dans le monde syndical américain à percevoir le danger ontologique que posait le nazisme, non seulement aux Juifs, mais à toute organisation démocratique et tout d’abord au mouvement ouvrier.  Et, à la différence des autres organisations juives américaines, il percevait que l’antisémitisme n’était que l’un des fléaux du nazisme destructeur de toutes les libertés civiles. « Depuis l’aube des temps industriels, les Juifs ont été le baromètre du mouvement ouvrier. Lorsqu’un gouvernement les persécute il s’ensuit inévitablement qu’il persécutera les ouvriers » affirma son fondateur Baruch Charney Vladeck  .

Les fondateurs du JLC avaient tous été des partisans du Bund dans l’Empire russe avant leur émigration aux Etats-Unis dans les années 1900-1910.  Ils avaient donc non seulement une origine européenne, mais aussi une origine politique commune qui les distinguait des branches principales, généralement apolitiques, du mouvement ouvrier américain.  L’idéal bundiste  non tari en eux  par les années d’immigration  fut la source de leur engagement dans la lutte antinazie dans les années 1930 et 1940. Le Bund – l’Union générale des travailleurs juifs de Lituanie, Pologne et Russie - ait été à la fois un syndicat général consacré à la défense du prolétariat juif de la Zone de résidence, - défense des travailleurs mais aussi de leur culture distincte dans la langue yiddish - et un parti politique d’inspiration socialiste. En tant que tel il avait été l’allié du Parti Ouvrier Social-Démocrate Russe dans le mouvement révolutionnaire contre l’Empire tsariste. Beaucoup de ses militants, très actifs dans les grèves insurrectionnelles de 1905, durent s’exiler afin d’échapper à la répression politique. Aux Etats-Unis c’est dans le mouvement syndical que se transmit leur ardeur révolutionnaire.  Employés dans l’industrie du vêtement, comme la majorité de leurs congénères récemment immigrés d’Europe centrale, ces activistes impulsèrent un élan définitif à la syndicalisation des « métiers de l’aiguille ». Habitués à la clandestinité, à la lutte des classes et à l’organisation de grèves de masse, ils dynamisèrent un secteur resté très morcelé et peu dynamique jusqu’à la Première guerre mondiale.....  

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