MOLCER 10-Catherine Goblot-Cahen 
Dans ce court volume, les historiens Marc Bélissa (professeur émérite à Nanterre) et Yannick Bosc (maître de conférences à l’université de Rouen) proposent de découvrir par les textes Louis Antoine Saint-Just (1767-1794), un de ces très jeunes hommes auxquels Révolution Française a ouvert une carrière aussi fulgurante que tragique. Après une présentation de la vie et des idées politico-philosophiques de Saint-Just d’une vingtaine de pages, le volume offre un choix de textes abordant les principaux thèmes de son œuvre, chacun suivi de commentaires qui en facilitent la compréhension et d’un choix de références bibliographiques ; une utile chronologie finale resitue les principales dates de la vie et de l’œuvre de l’auteur dans le cours des principaux événements historiques.  
Au rebours de l’image glacée d’« archange de la mort » (Michelet) ou de « jeune homme atroce » (Sainte-Beuve) que la légende noire, formée dès l’époque thermidorienne, a voulu présenter de lui, Saint-Just apparaît comme un jeune homme sensible du XVIIIe siècle, qui partage avec Robespierre plus d’un point commun  : tous deux sont originaires de cette région du Nord de la France qui vit alors d’agriculture et de proto-industrie textile, tous deux sont demi-orphelins (Saint-Just perd son père à 10 ans, Robespierre sa mère à 6 ans et ne voit plus son père) et vivent dans un entourage féminin (tantes maternelles et sœurs de Robespierre, mère et sœurs de Saint-Just) ; leurs familles d’origine sont d’aisance modeste, ce qui les conduit à la carrière du droit (Robespierre est avocat à la Cour d’Artois et Saint-Just est clerc de procureur) ; tous deux, influencés par la lecture des philosophes et tout spécialement de Rousseau, mettent par écrit leurs réflexions philosophico-politiques et tous deux, nouant des contacts avec les pauvres paysans ou artisans de leur région d’origine vont s’impliquer dans la défense des conditions de vie de leurs concitoyens les plus malheureux. Ils partagent par conséquent certains affects. On comprend qu’ils aient été aspirés par les événements parisiens et qu’ils se soient retrouvés au club des Jacobins, puis sur les bancs de la Convention, du côté de la Montagne. Alors âgé de 25 ans, Saint-Just est le benjamin de cette assemblée. Entre le 21 septembre 1792 (abolition de la monarchie) et le 28 juillet 1794 (jour de l’exécution de Saint-Just et de Robespierre), sa carrière politique va durer 22 mois. Il se distingue par quatre entreprises principales : ce sont d’abord ses discours lors du procès de Louis XVI qui le rendent célèbre ; il contribue ensuite à la rédaction de la Constitution de 1793 et la Déclaration des Droits qui la précède reprend plusieurs de ses articles ; ensuite, au Comité de Salut Public, où il entre le 10 juillet 1793, son activité se déploie dans deux directions : assurer au peuple des moyens de subsistance pour l’attacher à la République et repousser de la France révolutionnaire l’invasion par les armées des rois d’Europe coalisés contre elle. Envoyé avec Philippe Le Bas en Alsace, puis dans le Nord, il forme avec ce dernier la paire de représentants en mission la plus efficace puisque c’est en partie grâce à leurs efforts que l’invasion de la France sur ses frontières du Nord-Est est définitivement repoussée. Une fois acquises ces victoires, Fouché, le « mitrailleur de Lyon » et Tallien, septembriseur devenu modéré, se sentant tous deux menacés, s’appuient sur les députés de la Plaine pour empêcher Robespierre et Saint-Just d’agir et de parler à la Convention et pour les envoyer à la guillotine le 28 juillet 1794. Saint-Just meurt avant d’avoir atteint ses 27 ans. Après cela, la révolution est reprise en main par les Thermidoriens, la fraction bourgeoise la plus opposée à l’exercice réel de la souveraineté populaire, qui lance la France dans la guerre de conquête. 

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