MOLCER 5, Jean-Numa Ducange
La question des nationalités semble être d’une brûlante actualité depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022. Mais ce qui se passe aujourd’hui sous nos yeux a une longue histoire, qui a partie liée avec l’histoire du mouvement ouvrier.
Celui-ci a été en effet confronté depuis sa naissance dans la première moitié du XIXème siècle à de nombreux problèmes à résoudre. La défense des droits nationaux d’un certain nombre de peuples était alors à l’ordre du jour : la lutte des classes se mêlait dans certains cas étroitement à la libération nationale. Que l’on pense à l’exemple allemand (l’unité n’est réalisée qu’en 1871) ou à la Pologne (occupée et opprimée de la fin du XVIIIème siècle aux lendemains de la Première Guerre mondiale). Qui plus est les grandes puissances occidentales ont conquis d’importants territoires sur les autres continents, en Afrique et en Asie, posant un autre problème concret : celui des droits des colonisés.
Dans cette situation, les organisations socialistes ont dû se positionner : qu’est-ce qu’une « nation » ? Faut-il détruire les organisations supranationales comme les Empires en invitant à la création de nouveaux pays ? Ou bien faut-il davantage chercher à réformer ses structures ? Selon les configurations, les réponses formulées par plusieurs dirigeants du mouvement ouvrier ont été diverses. Dans l’entretien réalisé ici autour de notre livre Quand la gauche pensait la nation (Fayard, 2021), nous restitutions une série de positions qui permettent de comprendre les multiples enjeux qui traversaient alors les partis ouvriers au cours des décennies 1860-1920. Les mondes germanophone et russophone constituent alors des terrains d’expériences particulièrement intéressants. Ils nous permettent de comprendre comment l’articulation entre nation et internationalisme était l’objet de vives controverses, qui allaient se poursuivre tout au long du vingtième siècle.
En plus de cet aperçu général, le présent dossier présente une série d’études de cas qui permettent de voir comment, concrètement, les dirigeants et militants (socialistes, communistes ou encore ceux issus des oppositions de gauche au stalinisme) ont cherché à proposer des solutions immédiates et de long terme. L’article d’Éric Aunoble revient sur la question ukrainienne à travers l’histoire méconnue du bolchevisme dans ce pays ; une histoire falsifiée par les dirigeants actuels de la Russie comme par une série de médias occidentaux n’hésitant à pas essentialiser le nationalisme ukrainien. La présente contribution revient d’abord sur l’intérêt stratégique que représente l’Ukraine (alors intégrée à la Russie) dès l’époque des tsars ; à la fin du XIXème siècle le pays connaît en effet un développement économique spectaculaire. On remarque que si les sociaux-démocrates russes accordent tôt une importance à la question nationale, l’Ukraine ne constitue pas pour eux un sujet prioritaire, à l’inverse de la Pologne considérée comme le peuple opprimé par excellence. Longtemps les sociaux-démocrates – et la fraction bolchévique également – misent sur une extension des droits (une plus grande autonomie) davantage que sur l’indépendance. Lorsque peu avant la guerre Lénine systématise le « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » qui va connaître un immense écho à partir de 1917, beaucoup de militants restent circonspects.
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MOLCER n°5, décembre 2022 (à paraître) - Revue MOLCER
SOMMAIRE 1/ Introduction (voir sous les infos abonnement à la fin de ce sommaire) 2/ " Quand la gauche pensait la nation " interview de l'auteur Jean-Numa Ducange 3/ Gauches ukrainiennes par Eric ...
https://molcer.fr/2022/11/molcer-n-5-decembre-2022-a-paraitre.html
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